samedi 18 février 2012

Histoire de Biquette

Aïe aïe aïe...
En ce début d'après-midi, mon esprit est embrumé.
Mon amie Biquette est venue frapper à ma porte hier soir, les bras chargés de sushis et de bons vins.
Je compte mes amis sur les doigts d'une main. Et Biquette fait partie de cette main.

Lorsque Biquette apparaît, je sais que la nuit sera éternelle. Tout comme cette amitié que nous avons scellée à l'âge de 7 ans, sur les bancs de nos premiers cours de solfège et de piano.

Biquette est architecte, elle vit avec son Chéri et n'a pas d'enfants.
Biquette est une belle personne, un peu déjantée, d'une écoute généreuse et d'une sensibilité exacerbée qu'elle dissimule à merveille. Amoureuse des bons vins qui laissent parfois sur ses lèvres l'empreinte violette des vendanges, elle ressemble à une Brindille élancée. Et quand je la regarde manger avec appétit, engloutir chips et Curly, je me demande, perplexe, dans quelle partie de sa silhouette gracile peut-elle bien stocker toutes ces calories...

Biquette s'est inquiétée de ne pas avoir de mes nouvelles depuis quelques temps. Ca ne me ressemble pas.
Normal, j'ai passé ma semaine à essayer de neutraliser un moral capricieux qui m'a fait osciller entre "j'ai la pêche, je vais rebondir / je n'ai pas de job, quelle vie de mouette !!".

Soulagée de voir Biquette la rousse débarquer.

Biquette nous a servi un verre, j'ai trempé mes lèvres pour me délecter du breuvage, elle est restée silencieuse, ses yeux vifs couleur caramel posés sur moi, attendant que je crache la Valda.
Elle voulait tout savoir des épisodes manqués, elle a été servie :

- une mauvaise nouvelle n'arrivant jamais seule, j'ai reçu mercredi, jour des rigatoni, une lettre recommandée m'indiquant que je n'avais plus droit à ma carte de presse... Et bah voyons... Presque 15 ans que je la choyais. Pffftt ! En l'espace de quelques secondes, disparue, envolée, supprimée...
Ce n'est pas l'apocalypse, mais tout même, ça m'a foutu un coup.

- un colis m'attendait également, contenant quelques exemplaires du livre Santé que j'ai écrit et qui sortira bientôt en librairie.
"Journaliste-écrivain-en fin de droits-touchant bientôt l'ASS" : quelle ironie ! Mes yeux se sont humidifiés, de joie sûrement, de peine un peu quand même.
Je ne suis pas vraiment croyante mais à ce moment précis, il me semble avoir imploré les cieux pour que la roue tourne enfin pour moi bordel !

- jeudi, un regain d'énergie est venu m'électriser. J'ai décroché mon téléphone, contacté des entreprises, le Ministère de la Santé, le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour proposer ma plume, j'ai envoyé des CV à tous ces interlocuteurs charmants qui ne m'ont rien promis mais entrouvert leur lucarne.

- hier matin, je suis passée adresser mes amitiés à Pôle Emploi pour faire le point sur ma situation. Miracle : aucune file d'attente, le service ressemblait au désert de Gobi.
Deuxième miracle : la petite dame de l'accueil a été charmante.
A ce jour, je suis toujours en attente de mes attestations, ma situation est bloquée, je ne sais pas ce qui m'attend à la fin du mois. Restons zen.

- j'ai ensuite envoyé ma demande d'aide au logement puis filé à la CAF pour m'enregistrer et prétendre à un complément de RSA.
La petite dame de la CAF a regardé mon courrier de Pôle Emploi confirmant l'ASS.
J'ai vu ses yeux excédés regarder le plafond avant de revenir sur le courrier.
Elle a hoché la tête, l'air de dire que c'était vraiment n'importe quoi, avant d'accompagner sa gestuelle d'une parole :

"Ce n'est pas clair du tout du tout, Pôle Emploi fait vraiment n'importe quoi".

J'ai entendu son premier soupir d'exaspération.
Incompétence de Pôle Emploi depuis la fusion, système gangréné, conseillers et hiérarchie déplorables, à remplacer...
Je l'ai écoutée fustiger un système en perdition.
J'ai pensé que la petit dame de la CAF devait voir toutes les couleurs de l'arc-en-ciel avec Pôle Emploi.

- j'ai fait un petit tour sur mon compte en banque...  et j'ai vu rouge. Nous ne sommes que le 17 février et je suis déjà en négatif. J'ai pensé agios, agios, agios.

J'ai cessé de parler. Entre deux sushis et dans l'euphorie de cette légère ivresse, Biquette et moi avons dansé sur "New York New York" en riant à gorge déployée, en nous disant que nous étions de grands bébés un peu fofolles.

Je lui ai enfin parlé de mon amour éternel pour l'écriture, de mon blog, de son pouvoir énergisant, de mes premiers lecteurs, de leurs encouragements et de leurs galères aussi...

Fin des épisodes.

Tandis que la nuit silencieuse déposait sa couverture noire autour de nous, Biquette m'a serrée très fort dans ses bras, très longtemps. Je l'ai entendue murmurer que c'était normal d'avoir peur, qu'il nous arrivait à tous de perdre pied à un chapitre de notre vie, mais qu'il ne fallait pas, que tout irait bien, que j'allais m'en sortir.

La nuit magique et mystérieuse fut témoin de deux amies d'enfance enlacées près d'une fenêtre entrouverte. Malgré l'heure tardive, nous avons entendu les premiers oiseaux piailler doucement...
Nos lèvres légèrement colorées ont souri. Le printemps n'est plus très loin.

C'est samedi. Dehors, il fait doux, les oiseaux entonnent une mélodie joyeuse depuis ce matin.
Je suis sous la couette à écrire et je me sens bien, malgré les tracas, ma tête qui tambourine et mon ventre qui émet des grognements de mécontentement. J'ai sans doute un peu trop forcé sur le raisin.
Je me dis que si le chemin est parfois épineux, la vie sème surtout des moments forts et précieux qui nourrissent l'âme et me rappellent que cette vie-là, simple et authentique, est belle et pleine d'espérance.

Allez, j'arrête d'écrire, ce post est un brin trop long et mes yeux auréolés de fatigue picotent. Je vais les fermer un instant avant de rejoindre Mister G et me lover dans ses bras réconfortants de Sicilien.

Il y a des jours légers, comme ça...







2 commentaires:

Anonyme a dit…

Courage, la roue va bien finir par tourner ! Contente de te lire enfin à nouveau. Je ne comprends pas pourquoi on supprime la carte de presse de journalistes au chômage. Y a-t-il une chance que tu la récupères un jour ?
Préviens-nous quand ton livre sera publié que nous l'achetions et on essaiera d'en parler autour de nous. Bon dimanche et @ bientôt ! LN77

La comtesse de Ségur a dit…

Merci chère fidèle lectrice ;)