Hier, à défaut de faire sauter la crêpe, j'ai fait sauter les élastiques !
9h00 pile-poil : j'arrive à mon Pôle Emploi pour fournir une attestation employeur, la pièce à conviction manquante de mon dossier. Cette attestation permettra peut-être de ré-ouvrir mes droits au chômage, donc de les prolonger, donc d'évincer l'ASS pendant encore quelques mois.
Pôle Emploi avait 3 ans pour réexaminer ma situation, mais il a attendu la dernière minute pour s'y mettre, histoire de bloquer mon compte, les sous et de me mettre une pression nerveuse supplémentaire.
9h05 : je ne fais pas la queue comme avant-hier (1 heure d'attente, les conseillers ne disent pas bonjour, sont mal-aimables, regardent leur montre, impatients de prendre la fuite).
J'arrive toute guillerette et fraîche du froid polaire devant la conseillère pour lui remettre ma petite attestation.
- "Ah mais non mais non, c'est une photocopie. Il faut l'original avec un vrai tampon et une vraie signature de l'employeur"...
Elle ne croit pas en ma bonne foi... Je lui indique gentiment le numéro de la comptable en bas de page, pour qu'elle l'appelle tout de suite...
- "Ah mais non mais non, je ne peux rien faire pour vous... Tant pis, si je n'ai pas le bon document, vous recevrez un courrier pour nous l'apporter".
Je lui explique poliment que c'est urgent, mes droits sont bloqués, je ne peux pas m'inscrire à la CAF ni recevoir d'aide au logement s'ils n'accélèrent pas la procédure...
"Ah mais non mais n...."
9h15 : et là, j'explose, je crie, j'hurle, je vocifère, je suis à bout... Tout le monde se retourne, tous les chômeurs comprennent et compatissent, le sourire dans leurs souliers.
9h16 : je crois que la Dame Pseudo Conseillère a compris... Elle décroche son petit téléphone et appelle la comptable...
9h20 : je ressors dépouillée, la larme à l'oeil. J'ai froid, j'ai envie de me pelotonner sous la couette mais je dois m'engouffrer dans le métro pour me rendre à une conférence sur une nouvelle pilule contraceptive.
Quelle magnifique journée !
12h30 : retour chez moi, tout va mieux. Je suis apaisée.
15h00 : je tourne en rond, je ne fais rien de bien, je décide de m'accorder une pause, une vraie. J'ai envie de voir "L'amour dure trois ans"... J'adore Frédéric Beigbeder, sa folie, sa vivacité d'esprit. Son roman m'avait plu...
Je fais mes comptes : c'est bon, je peux encore me payer une séance à 10 €, tiens, 3 ans, la même durée que mon chômage.
16h45 : la séance est entamée et le paquet de Granola largement aussi. Une éternité que je n'avais pas succombé à cette saloperie doucereuse. Quel bonheur !
Ce n'est pas le film du siècle mais c'est léger, bien mené, je passe un bon moment.
18h30 : retour chez moi, revigorée. Coup de fil de Bambou, enrhumée. Elle a la voix d'un "trans", je peine à la reconnaître. Je ne savais pas que l'urticaire engendrait des mutations...
19h45-22h : séance de yoga après des mois d'abstention. Je pratique depuis 6 ans mais j'avoue que ces derniers temps, le chômage grignote mes bonnes énergies.
Les tensions lâchent une à une, mon corps reprend vie, mon esprit se vide de pensées parasites... J'oublie que rien n'est simple en ce moment. Une étrange euphorie m'envahit.
22h30 : ma fenêtre est entrouverte, un parfum de crêpes se glisse dans mon appart'. Je me souviens qu'aujourd'hui, c'est la chandeleur... Petit pincement au coeur. Je suis seule, je ne peux même pas faire sauter ma crêpe avec Chéri-Chéri. Ces derniers jours, quelques tensions s'interposent entre nous. Je commence à croire que l'amour ne dure même pas trois ans...
23h : ne surtout pas ruiner mes énergies positives. Je me glisse sous la couette. Je savoure, je ferme les yeux, je ne pense plus à rien, ni à Pôle Emploi, ni à la partie de crêpes loupée, ni à mes amours contrariées, ni au fait que l'amour dure trois ans.
Je me dis que ça fait du bien de se faire du bien, de ne penser qu'à soi, parfois.
Je souris et pour la première fois depuis longtemps, je me laisse bercer et emporter par Morphée.
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