jeudi 22 mars 2012

Une double frite !


En me levant, j'ai senti que je ne serai pas à la hauteur de cette journée.
Vous savez... quand le rideau de la nuit se lève pour laisser le jour entrer en scène, nous savons tous plus ou moins si nous jouerons la journée avec brio ou... pas. La mienne commença raplapla.
21h-9h du mat' : j'avais déjà fait le tour du cadran et cela n'annonçait rien de bien productif. Je me suis réveillée fatiguée et lasse, sans jus et sans entrain.
Pas la frite...

Comme si le monde du travail s'était passé le mot, les réponses négatives à mes CV se sont accumulées sur ma boîte mail, accompagnées de cette lancinante litanie : "nous ne recherchons personne pour le moment, bon courage dans vos recherches".
L'euphorie du Salon du livre est retombée, telle une crêpe en l'air loupant la trajectoire de la poêle pour atterrir illico sur le lino.
Vraiment pas la frite...

Pour en rajouter une louche, un site qui a pignon sur internet m'appelle pour me proposer d'écrire pour eux.
Chouette ! Super ! Le mercure de mon entrain remonte.

- Je serais ravie ! Pouvez-vous m'en dire plus ?
- Il faut rédiger 15 dossiers de deux pages chacun et trouver la documentation pour étayer vos écrits.
- Avec plaisir ! Et côté tarifs, combien me proposez-vous ?
- 10 euros le dossier, ça me semble correct... Et c'est à rendre pour... hier. 

J'ai l'impression d'être considérée comme une débutante en fin de stage à qui l'on propose de "démarrer dans la vie".
Dépitée, je suis...

Pour enfoncer le clou, j'ai rendu visite à mon ami Pôle Emploi. Il me manquait tant !
Je voulais comprendre le pourquoi du comment des 300 euros débités de mes Assedic ce mois-ci.
Une dame "Indemnisation" m'explique que ces 300 euros équivalent aux 7 jours de carence dus à la réouverture de mes droits au chômage.
D'une voix lente, comme shootée au Lexomil, elle m'a dessiné de jolis croquis tout bleus, avec des petites croix et des cercles, je suis nulle en calcul, je n'y ai rien compris, il m'a semblé qu'elle non plus... 
300 euros... c'est un peu moins que la somme débitrice qui sous-alimente mon compte en banque. Et nous ne sommes que le 22...
Non seulement Pôle Emploi fait des conneries mais en plus, il m'embrouille et me rackette. 
Une double frite, s'il vous plaît !!

Bip Bip. Mon portable sonne. Mamounette.
Elle m'invite à assister à un concert classique gratuit. Rendez-vous à 12H30 à l'Ecole Normale de Musique de Paris. Le concert est assuré par des élèves en dernière année. Belle idée !
Je fixe ma montre. Je me scrute dans le miroir. J'ai exactement 5 minutes pour troquer mon vieux legging et mon sweet XXL à l'effigie de Félix le Chat, contre une tenue décente.
Mamounette a horreur de me voir le cheveu gras et l'oeil cerné.
Jean, chemise, Converse, coup de brosse, coup de mascara, je m'engouffre dans le métro.
Direction Malesherbes.

Vrrr... mon portable vibre. Texto de Bambou.
Elle me confirme notre Pyjama Party de demain soir et me précise qu'un imbécile vient d'écraser sa cigarette sur le capot de sa voiture. Le capot est troué, elle va devoir payer...
Elle non plus n'a pas la frite.

Arrivée à l'Ecole de Musique. Je me suis fait toute petite dans l'imposante salle de concert (à l'acoustique parfaite), j'ai scruté les beaux pianos à queue, échos de mes quinze années à faire galoper mes mains sur les touches blanches et noires.

Je me suis laissée porter par la virtuosité des élèves (peut-être un poil trop techniques et manquant d'émotions) interprétant Beethoven et Bartok.









Je l'avoue, je n'ai pas tout aimé, j'ai même failli somnoler quelques minutes, ou bien était-ce la fringale qui tenaillait mon estomac et endormait mon esprit ? 
Ce moment intemporel de transition musicale a coloré ma journée qui avait démarré gris souris. Mamounette a toujours le chic pour me changer les idées et me faire oublier ma petite crise économique personnelle.
Mamounette et moi avons déambulé un moment avant de nous alanguir à la terrasse d'un bistrot assailli par les Parisiens en mal de soleil. Vite, de la vitamine D !
J'en ai pris aussi, de la vitamine D, les rayons solaires venant forcer le barrage de mes pupilles endormies.

Mamounette m'a regardée avant de me sonder :

- Tu n'aurais pas un peu maigri toi ?

Moi, intérieurement : "sûrement, avec les kilomètres que me fait cavaler Pôle Emploi !"

Moi, lui répondant sans ambages :

- Je ne sais pas. C'est peut-être l'arrêt de la viande. Depuis mon séjour dans le Beaujolais à tester les saucisses, les pâtés et la viande rouge sous toutes ses formes, j'ai fait une overdose".


- Mange, ma fille. Il n'y en a plus de toi !

N'exagérons rien, je n'ai pas non plus l'allure d'un cure-dent. Mais comme toutes les bonnes mamans arméniennes, la mienne adore me voir finir l'assiette et reprendre une part.

Enfin, le serveur nous a apporté la carte du menu. Et devinez ce que j'ai commandé ?




Une double frite, bien sûr !


Aucun commentaire: