vendredi 24 février 2012

Grignoteurs de cellulite

L'aube des beaux jours commence à empiéter sur les trop longues nuits de l'hiver.
Les matins sont d'une luminosité plus chaude.
Les réveils plus doux.
La bonne humeur intacte.
Les coeurs gonflés d'envies.

Le radio-réveil devient inutile. Les premières lueurs ont filtré les rideaux de velours rouge et m'ont réveillée comme une caresse.
Je me suis étirée et j'ai sauté du lit pour me préparer puis monter sur mon vélo.
Les cheveux au vent printanier, j'ai roulé à vive allure.
Direction : Pôle Emploi où une conseillère en haut lieu m'avait conviée pour faire un point.

Depuis ma missive de mécontentement adressée au médiateur national, la situation prend une toute autre tournure.




Le parcours Maison/Pôle me prend 10 minutes.

La jeune femme me reçoit dans son bureau chaleureux.
Elle est sympathique, elle dégage de bonnes ondes, je me sens bien, je m'enfoncerais presque dans le fauteuil couleur "Service administratif", couleur bleu roi.
Bienveillante, elle retrace le parcours de mon dossier, accepte les attestations employeurs refusées depuis des semaines, même les photocopies, mêmes celles qui sont raturées et ne s'habillent pas de signatures et de tampons. Elle n'en a que faire, elle est conciliante, à l'écoute, c'est un amour !
Je soupçonne le médiateur national d'être derrière ce subit revirement.

Le dossier est clos, j'aurai une réponse définitive lundi prochain, je la remercie. Tout le monde devrait tomber sur elle pour le bien de ses chakras.
Je m'apprête à la saluer et à partir quand...
soudain...

Soudain, la jeune femme aux cheveux bruns relevés en un subtile chignon évanescent s'arrête sur mon ASS de 8 euros et des poussières d'étoiles.
Dans un long battement, ces cils se lèvent vers moi, le silence est d'or avant que sa voix zen ne vienne le rompre d'un incroyable :

"ILS se sont trompés. Vous ne devez pas toucher 8 euros d'ASS mais 15,63 euros journaliers".


Soit l'équivalent du RSA.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Aucun conseiller n'a su rectifier cette modique somme fourrée sous leur nez, tous m'ont servi des explications fumeuses et des "je ne peux rien faire".
Mouette, mouette, mouette alors !!!!

Les ongles soignés et parfaitement rouges de la jeune femme pianotent sur le clavier. En une seconde, ma situation ASS est bouclée... après plus d'une heure dans son bureau et un mois d'allers-retours à Pôle.

J'enfourche mon vélo pour me rendre à la CAF, service Insertion. Je veux absolument délivrer la bonne attestation ASS pour régulariser ma demande de RSA et d'aide au logement.

Mon portable vibre. C'est Mamounette. Je suis obligée de décrocher sinon, en bonne maman arménienne-bileuse qu'elle est, Mamounette va étioler son capital sommeil déjà bien entamé.
Je lui explique, j'entends ses "hum hum" stressés et son énième "j'espère vraiment que tu vas retrouver un travail" (non, non pas moi, je t'assure Mamounette, j'adore pédaler dans la choucroute).
Je sens son angoisse traverser le périphérique et les lignes téléphoniques, j'abrège, je la rassure et je raccroche. Je t'aime, je t'adore Mamounette, mais impossible à cet instant de prendre tes craintes sur mes épaules déjà lourdes.


Le parcours Pole Emploi/CAF me prend 15 minutes.

Un gentil monsieur me reçoit et me dit que non, non, non, ce n'est pas ici mais au siège de la CAF.
Je fais crisser les fines roues de mon vélo, demi-tour, à l'assaut de la CAF !
Je m'engage dans les voies de bus, je me faufile entre les voitures effrénées, je traverse des ponts solides et fiers, j'admire la Seine qui s'écoule avec langueur, j'admire Paris... Comme elle est belle.


Le parcours CAF Insertion/Siège de la CAF me prend 20 minutes.

J'arrive au sinistre siège de la CAF et me pose comme un pion supplémentaire dans la longue file d'attente. Il y a des jeunes et des moins jeunes, la présence d'une dame âgée me frappe, certains sont hagards, d'autres hurlent dans leur portable ou se débattent avec eux-mêmes pour comprendre notre langue.
Dans mon dos, un garçon ne cesse de jurer, impatient. Je retire ma doudoune, faire du vélo m'a donné très chaud, j'ai l'impression qu'il fait 40 °C.
Mon portable vibre. C'est Bambou qui m'envoie sa nouvelle coupe de cheveux en photo. Elle sort d'une grippe (ni A ni aviaire) et avait grand besoin de se refaire la frimousse. C'est réussi, elle ressemble à Winona Ryder.

Enfin, après 30 minutes d'attente, c'est mon tour. Mon cas prend 1 minute.
Je repars sur mon vélo, laissant derrière moi le bâtiment suranné aux murs sombres et fissurés, abritant les âmes en peine.

Le parcours Siège de la CAF/Maison me prend 20 minutes.

J'arrive chez moi le feu aux joues et la peau moite.
Je remonte mon jean slim qui tombe un chouia et ne colle plus vraiment à mon corps.
Mon portable vibre de nouveau. C'est Mister G. Je décroche et je l'entends chantonner d'une voix de canard de dessin-animé des "coincoincoincoincoin" à tout va.
Le Sicilien me déclenche un fou-rire spasmodique.

Au total :

- J'ai pédalé plus d'une heure à un rythme soutenu. Le sport, c'est bon pour la santé !

- 1 heure de vélo = 360 à 900 calories brûlées, soit 3 fois plus qu'une heure de marche.

- J'ai donc largement éliminé les 3 Nonnettes au cassis du goûter et les pâtes au roquefort aspirées hier soir en compagnie de Mister G.

- En 1 mois, je me rends compte que tous ces va-et-vient Maison/Pôle m'ont fait perdre 1,5 kg.

Conclusion :

- Pôle Emploi et la CAF sont des petits gloutons de capitons, grignoteurs de cellulite et de kilos.
A côté, les régimes et les crèmes amincissantes, c'est de la gnognotte.
A condition d'y adhérer à pied, en vélo ou à cheval, et régulièrement.

- Grâce à eux, je fais du sport et j'entretiens ma ligne.

Si tout ce cinéma marathonien continue, finirais-je comme Elle ?

Elle Macpherson, dit The Body 

J'ai enfin réglé le gros du problème et ôté l'os de la moulinette.
Soulagée, la Comtesse.
Toutefois, j'ai perdu ma matinée (8h-14h) à régler les erreurs de Pôle (pour ne pas dire un mois), et un temps précieux normalement consacré à trouver un job.
Bravo Pôle ! Merci Pôle !

Du coup, j'ai pris mon après-midi. A ne rien faire. A me vautrer dans le canapé, entre lecture, écriture et zapette.
A attendre que mon vendredi soir commence sans savoir ce qui m'attend...

Je vous abandonne.
Pressée de découvrir les surprises de cette fin de journée.





















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