mercredi 8 février 2012

Pôle Emploi, le voleur de sourires

Franchir la porte de Pôle Emploi, c'est devoir admettre qu'on en ressortira la gorge serrée et les larmes au bord des yeux. Peu importe le début ou la fin de journée que nous venons de passer. Peu importe qu'un rayon de soleil puisse, à un moment donné, illuminer cette journée. Oui, peu importe. Car il suffit de quelques secondes pour que Pôle Emploi fasse voler en éclat cette bonne humeur si précieuse, que nous essayons de préserver farouchement.

Ce matin, j'ai aperçu le blanc pur de la neige, qu'une nuit glaciale avait figé sur les arbres et le muret en pierre que j'aperçois depuis ma chambre. J'ai levé les yeux et le bleu franc du ciel est venu s'incruster dans mes yeux embrumés de sommeil... J'ai souri, comme une gamine...

Je me suis préparée l'âme légère et le moral joyeux. Je suis allée à une conférence de presse où une dame m'a raconté son magnifique métier : nez pour les parfumeurs.

De retour chez moi, coup de fil de l'un de mes employeurs : les attestations employeurs sont prêtes, je peux venir les chercher. Grâce à ces attestations, mon dossier pour recalculer mes droits va enfin être complet ; je peux espérer voir mes allocations se prolonger avant de toucher la misérable ASS.





16h : j'arrive à Pôle Emploi avec le sourire, même si c'est la cinquième fois que je m'y rends en une semaine. Les conseillers s'en fichent, ils pensent sûrement que nous n'avons que ça à faire.









Il y a 10 personnes devant moi. Une jeune chômeuse se dirige vers la porte de sortie, en larmes. Mon sourire faiblit légèrement.

C'est enfin mon tour. Je me retourne : 15 personnes attendent dans mon dos. Elles étaient à peine 5 il y a cinq minutes !




Je m'approche d'une jeune conseillère (pas la même que la dernière fois). Elle ne m'adresse pas un regard, pas un sourire, pas un seul bonjour. Je reste zen. Je lui souris pour de vrai, dis bonjour comme je le fais dès que je rencontre un être humain, je lui tends les attestations manquantes.
Mes chakras sont bien déployés.

La conseillère mal aimable me précise que ces attestations sont irrecevables car :
- il y a une minuscule rature
- il y a 2 millimètres de Tipp-Ex à un endroit
- il est indiqué "fonction libérale" pour le titre de mon employeur mais ça ne va pas, il faut indiquer autre chose mais elle ne saurait me dire quoi.
- les attestations sont remplies à la main et tapées à l'ordinateur : non, non, non, elles doivent être remplies SOIT à la main SOIT à l'ordinateur...

Mes chakras se rétractent lentement. Je tente une respiration yogique, du ventre jusqu'aux poumons...

La conseillère mal aimable plante enfin ses yeux dans les miens. Sa bouche s'ouvre pour former un rictus :

- Mais qu'est-ce que c'est que ce nom d'entreprise ?
- Et bien c'est le nom du site internet pour lequel j'ai écrit en tant que journaliste.
- Ah oui, et ça parle de quoi ?
- C'est un site féminin, sur la beauté.

- Ah oui... je ne connais pas... 

Elle ne me croit pas, je le sens et je le vois à la façon méprisante et suspicieuse dont elle me toise. Elle croit que je mens, que j'ai bidouillé ces attestations.
Mes chakras se referment, définitivement.
J'ai du mal à respirer, je sens la petite boule prendre forme au fond de mon gosier...
Je me contiens, je lui explique que c'est urgent, que ça fait 5 fois que je viens. Et là, la FAMEUSE réponse :

-  Ah mais JE NE PEUX RIEN FAIRE. Tant pis, vous reviendrez une sixième fois.

Mais le clou du clou du tableau est sa chute :

- Je vois qu'il nous manque une fiche de paie du mois d'août 2011. Vous avez déclaré avoir travaillé mais nous n'avons pas la preuve ! Il faut revenir avec la fiche de paie.

Eté 2011... c'est si loin... Je sais que j'ai bien envoyé le justificatif de cette fiche de salaire, je le fais à chaque fois. Je n'oublie jamais, je suis une chômeuse studieuse.
Je suis face à un mur qui ne s'écroulera jamais. La discussion est close.

Je pousse la porte de Pôle Emploi qui me paraît lourde, si lourde, et je repars avec un sentiment d'injustice et d'impuissance.
Le ciel bleu a disparu pour laisser place aux prémices de la nuit, la neige a fondu et mon sourire aussi.

De retour chez moi, j'ai contacté mes employeurs pour qu'ils m'adressent les bonnes attestations. C'est génial, à présent ils savent tous que je suis au chômage !

Mister G, mon homme, m'a appelée. Sa bonne humeur ne réveille pas la mienne. Je suis grognon. Plus la force de sortir par ce froid, plus envie de rien, juste de me recroqueviller sous la couette à regarder Grey's Anatomy. Rien de mieux que des opérations sanguinolentes pour se sentir vivante !

Pôle Emploi a encore réussi à me donner envie de pleurer.
Il m'a fauché mon sourire, mes bonnes énergies, ma journée. Il ne manquerait plus qu'il me fauche Mister G.
Nous ne devrions jamais avoir à franchir les portes de cet enfer.

Pôle Emploi est un voleur...



4 commentaires:

@Blabladebitch a dit…

C'est tellement vrai ce que tu racontes... Le pot de terre contre le pot fer !!

Paul est un voleur, doublé d'un escroc et d'un usurpateur d'identité ! Quand je pense que j'avais confiance !! Ce matin 9h je devais avoir mon 1er entretien avec ma conseillère alors que je suis au chômage depuis... 620 jours !! Belle blague hein ? Le pire ? Il n'a pas eu lieu, on m'a appelé à 9h15 pour me dire qu'elle était en arrêt maladie !! Le plus drôle, mes droits s'arrêtent dans 8 jours !! Vive la France ^_^

La comtesse de Ségur a dit…

Bonjour Blabladebitch

C'est incroyable ! Le premier mot qui m'est venu à l'esprit pour le titre de mon post est "usurpateur"...
Oui, Pôle Emploi est une énorme blague qui use nos nerfs... Je te souhaite du courage, encore et encore, de tenir bon, nous devons tenir bon...
et bienvenue sur mon blog, quand tu veux, pour t'exprimer !
A bientôt pour de nouvelles aventures, l'histoire est loin d'être finie

bonne journée

Une victime de pôle emploi a dit…

Superbe article, bravo et bien vrai. Nous pôle emploi à détruit notre famille ! Ma femme a voulu se suicider 2 fois et à fait 5 mois d’hôpital car elle n'a pas supporté l'injustice d'une administration défaillante et diabolique...

Anonyme a dit…

Bonjour , merci! de rapportter (avec votre talent) la pénible vie de demandeur d'emploi je suis apres trois années de chomage convaincu que les consiels agrave notre situation Merci !